THE UNOFFICIAL JOHN DOGGETT's BLOG

GAUCHE (état de la)

Cf. aussi POLITIQUE - PARTI SOCIALISTE

Ordre chronologique, de haut en bas.


QUELQUES MOTS DE BAKOUNINE

"Un bourgeois qui n'a pas le pouvoir est préférable à un prolétaire qui l'a."

"La liberté sans le socialisme, c'est le privilège, l'injustice ; et (...) le socialisme sans la liberté, c'est l'esclavage et la brutalité."


14 juillet 2007 : CONFUSION DES DEBATS - RETOUR AUX FONDAMENTAUX

Incontestablement très habile et manipulateur, Sarkozy réussit à brouiller encore plus les frontières idéologiques, et par la même occasion à couler davantage encore le PS au moyen de sa "politique d'ouverture". On aurait cependant tort de juger sain et positif ce "dépassement" des clivages. Il ne s'agit absolument pas de faire une politique qui reprendrait idéalement ce qu'il y a de bon dans les idées de gauche et dans celles de droite (ça c'est l'image de carte postale qu'ont de la politique les gens de bonne volonté qui n'y comprennent rien) ; il s'agit simplement de faire passer une politique de droite dure en la diluant dans une rassurante apparence de diversité politique ("si c'est varié, ça ne peut pas être si à droite que cela", est-on supposé penser), apparence facilement obtenue en racolant quelques carriéristes qui n'ont de gauche que l'étiquette (il paraît que Chirac disait de DSK : "il est de gauche autant que moi je suis évêque") et quelques idéalistes naïfs (accordons le bénéfice du doute à Martin Hirsch et à Fadela Amara). L'essentiel est de brouiller les repères. Face à cela, les discours critiques et les propositions alternatives semblent creux et cafouillants et on a l'impression désespérante qu'il n'y a plus rien à faire contre ce discours dominant parfaitement manipulateur et parfaitement au point. Un seul espoir peut-être : commencer par revenir aux fondamentaux. Si l'on considère que la gauche, c'est tel ou tel parti, par exemple le PS, alors, en voyant Kouchner, Lang, DSK, venir se coucher aux pieds du nouveau maître, on en perd un peu son latin. Mieux vaudrait (enfin) revenir à une définition de base : la gauche est (devrait être) le camp du progrès humain et social, la droite celui de la conservation (et même actuellement de la restauration) des privilèges d'une élite sociale.

On évitera au passage les pièges sémantiques créés depuis des décennies pas la nouvelle droite, qui s'approprie la notion de progrès (appelant ainsi des réformes constituant en réalité des régressions d'un point de vue social, mais un progrès certain pour le MEDEF) et situe les "priviléges" dans le camp adverse (par exemple, un privilégié n'est pas un type qui ne sait plus que faire de son argent mais qui le planque tout de même dans un paradis fiscal pour ne pas avoir à en donner une miette à la collectivité : non, les privilégiés, ce sont les cheminots qui abusent de leur droit de faire grève alors que les salariés du privé ne peuvent plus guère se le permettre sous peine d'être virés : est donc privilégié celui qui n'est pas totalement esclave de l'élite réelle alors que dans l'idéal il devrait l'être).

On s'efforcera donc de juger des notions de progrès et de régression non pas à l'aune des appréciations portées (pardon : "quotidiennement matraquées") par les "journalistes" de TF1 (exemples de progrès : l'assouplissement puis la disparition du code du travail, l'allègement de la fiscalité pour les plus grandes fortunes / exemples de régression : les Français s'accrochant à leur droit de grève, à leur système de santé,...), mais à partir de définitions simples et claires : "mérite d'être considéré comme un progrès tout changement qui contribue à améliorer les conditions d'existence du plus grand nombre, sans pour autant nuire lourdement et injustement à qui que ce soit, y compris à une minorité". J'ajoute cette précision au nom de la règle morale fondamentale selon laquelle "la liberté de chacun finit là où commence celle des autres". Avec quelques petites lumières comme cela bien présentes à l'esprit, peut-être se donne-t-on une petite chance d'y voir à peu près clair dans le brouillard actuel (brouillard artificiel et savamment entretenu).

Rappel : On sait bien que l'une des techniques les plus habituelles de cette manipulation politico-médiatique est celle qui consiste à répéter qu'une chose est indispensable, nécessaire, inévitable.

Autre sujet de confusion de plus en plus présent : l'ethnicisation des débats. Toute réflexion sur le racisme, à commencer par celles qui prétendent le combattre, reposent sur une approche racialiste. On devrait rappeler en permanence la saine réalité, qui est que les races n'existent pas, que seules existent des cultures, des éducations et des histoires individuelles. Toutes vérités qui permettraient peut-être, si elles étaient enfin intégrées, de traiter un peu plus efficacement des questions que l'on s'obstine, au lieu de cela, à brouiller en ne dénonçant le racisme que comme l'agression commise par des races méchantes contre des races gentilles : on est là dans Star Trek et pas dans le réel. Méchants européens contre gentils arabo-musulmans et gentils noirs, ou alors méchants arabo-musulmans antisémites, ce sont à peu près les deux visions du monde que l'on nous propose actuellement. Chacune d'elle repose évidemment sur des faits réels (l'esclavage et la colonisation ne sont pas des mythes, le Front national existe, la politique d'Israël est contestable et les Juifs nous gonflent depuis des millénaires avec leur prétention à être un peuple élu ; d'un autre côté cela ne justifie pas les délires antisémites bien réels qui se multiplient, etc.) mais il s'agit d'une réalité partielle qui se trouve généralisée.

Celui qui tenterait d'assainir le débat en le débarrassant de ces éléments racistes drapés d'anti-racisme, qui oserait dire qu'un arabe ou un juif peuvent être aussi con l'un que l'autre ou aussi cons qu'un Français (surtout l'un que l'autre, en fait), serait accusé de racisme. Dire que l'humanité est la même partout, que dans toute culture l'individu peut s'avérer capable du meilleur comme du pire, qu'une ordure est une ordure qu'elle soit française, israëlienne ou saoudienne, qu'il n'y a que des hommes et des femmes victimes de logiques politiques et économiques auxquelles les question de race et de religion ne servent que de couverture, dire que la mémoire de la Shoah n'autorise pas l'Etat d'Israël à faire n'importe quoi, que la réalité de l'exploitation économique américaine n'autorise pas des fanatiques à faire exploser des innocents,... dire tout cela est devenu inacceptable. Nous sommes donc apparemment voués à choisir notre camp, c'est-à-dire, dans les grandes lignes, à cautionner l'antisémitisme et le terrorisme islamiste si l'on se veut de "gauche" (en tous cas de cette gauche radicale anticapitaliste qui se croit obligée de frayer avec les intégristes), à cautionner les politiques d'Israël et des USA si l'on est de droite ou si l'on refuse l'antisémitisme ... Tout cela est parfaitement grotesque.

Et pour célébrer la Fête Nationale, quelques réflexions politiques de Montesquieu.


17 octobre 2006

Il y a deux gauches actuellement. La gauche utopiste qui croit que la nature humaine est déjà assez évoluée pour qu'on puisse installer des systèmes de type libertaires sans que ça vire au carnage, et la gauche "réaliste" qui estime visiblement qu'on ne pouvait rien changer ni à la nature humaine ni à quoi que ce soit d'ailleurs (et surtout pas à l'hégémonie du Marché). Quant à trouver une gauche qui se fixerait comme objectif de créer les conditions d'un vrai changement (en particulier par l'éducation), on peut toujours rêver ...

Cf. aussi : Education


27 octobre 2006

Penser aujourd'hui qu'on peut changer le monde par l'action politique relève d'un optimisme naïf. Dans l'état actuel des choses, le seul moyen efficace (et non fumigène) pour rendre le monde plus beau me semble être l'alcoolisme.


14 février 2007: AMBIDEXTRES

"Interrogés sur le positionnement politique de la candidate PS, 15% la trouvent trop à gauche, 26% pas assez à gauche et 48% ni trop, ni pas assez à gauche." Etonnants, ces 48% ? Pas vraiment. Ca confirme simplement que, dans ce pays, la moitié des gens ne sait pas reconnaître sa droite de sa gauche (mais il faut avouer que les politiciens ne les y aident pas vraiment), en d'autres termes ne comprend que dalle à la politique. Et encore, c'est un minimum, parce que parmi ceux qui se prononcent (en particulier chez ceux qui la trouvent "trop à gauche"), on peut supposer qu'il y a également une bonne dose d'abrutis, simplement ceux-là sont des abrutis qui croient comprendre quelque chose. Exemple : Steevy trouve que Ségolène Royal est beaucoup trop à gauche.

Les optimistes diront que cela montre en réalité que 48% des français sont au-dessus des clivages partisans et estiment que c'est avant tout une question de candidat, de personnalité. C'est une autre façon, plus courtoise et plus démagogue, de dire que ces crétins ne comprennent rien à rien.


5 juin 2007 : LUTTE DES CLASSES ?

Un graffiti sur un mur : "Pas de guerre entre les peuples ! Pas de paix entre les classes !" Cela a le mérite de rappeler à quel niveau se jouent les véritables conflits. Attaché que je suis à la notion d'individu, je reste en revanche assez sceptique quant à l'idée d'une lutte des classes, du moins d'une lutte systématique et acharnée destinée à faire émerger un vainqueur, tant il peut y avoir parfois des gens sympathiques et de bonne volonté dans les classes supérieuses et tant il peut y avoir souvent de connards hargneux dans les classes dominées, des connards dont la victoire éventuelle n'augurerait certainement rien de bon pour personne. La perspective d'une négociation permanente faisant émerger de façon durable une société plus juste par le moyen de conflits sociaux, d'un progrès dialectique, me semble bien préférable au remplacement aussi inutile que radical d'un système injuste par un autre système injuste. Mais faire ce choix ne doit pas inciter à sombrer dans un angélisme béat : la notion de lutte des classes a le mérite de nous rappeler qu'il existe bien un conflit d'intérêts, et non des moindres ; que même les gens sympathiques sont conditionnés dans une certaine mesure par leur appartenance sociale ; que le progrès social ne pourra se faire qu'en luttant avec une fermeté extrême contre les tendances régressives actuelles.


Mars 2008 : LA GAUCHE CUL-BENIT

Le clivage entre "républicains" et "pédagogues" ne recouvre pas le clivage droite/gauche, j'ai déjà eu l'occasion de le noter. Lors d'un récent débat houleux, j'ai pu constater qu'aux yeux de certains les positions "républicaines" (qu'il s'agisse de méthode de lecture, de laïcité, etc.) sont forcément des positions de droite. Or je suis bien forcé de constater que, tout en soutenant largement ces positions, je ne me sens pas spécialement "de droite", et que la plupart des "républicains" que je connais sont foncièrement des gens de gauche, même si un certain nombre, ces dernières années, a parfois viré à droite, sans doute par écoeurement et lassitude (on les comprend) face aux trahisons et à l'arrogance du PS, face à l'irresponsabilité et aux divisions du reste de la gauche, face enfin à la déception de l'espoir qu'avait vaguement pu susciter Chevènement. On peut comprendre leur écoeurement et leur lassitude, mais on peut moins comprendre la solution qu'ils ont choisie : si on se sent de gauche, on ne règle pas le problème de l'incurie de la gauche politicienne en votant à droite, enfin il me semble ...

Toujours est-il que cela amène à se demander ce que c'est vraiment qu'être de gauche. La question n'est pas nouvelle et je l'ai déjà abordée ça et là, mais, en pensant aux vrais gens de gauche que je peux connaître comparé à ceux qui appartiennent à mes yeux à une gauche qui se tire dans le pied, je me proposais cette nouvelle formulation : la gauche, camp du progrès (je dis bien "progrès" et non "mouvement dans n'importe quel sens du moment qu'on remue"), est par nature névrotique, révoltée (avec ou sans violence, la question n'est pas là), insatisfaite du réel tel qu'il est, donc désireuse de le changer (progressivement ou radicalement, là encore ce n'est qu'une question de sous-catégories). La véritable gauche dit NON à tout ce qui la choque, la révolte. La pseudo-gauche aime dire OUI, elle ne dit non qu'à la réflexion personnelle (trop "prise de tête" ou "trop peu constructive") mais se plaît à dire amen à tous les jolis dogmes du catéchisme de gauche que lui servent ses leaders. C'est cela : la pseudo-gauche, qu'il s'agisse du PS ou de l'extrême-gauche dogmatique, adhère et croit au lieu de remettre en cause. En cela, elle est fondamentalement religieuse. Donc de droite.


7 novembre 2008 - BOULEVERSEMENT POLITIQUE ?

Je ne crois guère à l'espoir suscité par l'élection d'Obama (un type de droite comme un autre, même s'il a de bonnes chances d'être moins pire que Bush). En revanche, en France, une petite lueur d'espoir est apparue pour la gauche. La motion de Ségolène Royal l'a emporté au congrès du PS et du coup (non, ça n'était pas encore ça, la lueur d'espoir), du coup quelqu'un (en l'occurence Mélenchon) a enfin décidé de quitter un PS qui s'obstine dans sa logique libérale et de tenter de fonder un nouveau parti socialiste de gauche, ainsi qu'un front unique avec le PCF et le nouveau parti de Besancenot. A suivre (espérons le ...)


21 décembre 2008 : QUELQUES PRINCIPES POUR UNE REVOLUTION DIGNE DE CE NOM

- Renforcer les pouvoirs de l'Etat, en particulier sur la sphère économique.

- Renforcer la responsabilité des dirigeants de ce même Etat, son pouvoir renforcé ne justifiant plus son incapacité à agir.

A partir de là, tout politicien doit pouvoir être :

- renvoyé dans ses foyers au plus tôt en cas d'incompétence évidente.

- jugé (et lourdement condamné) pour haute-trahison si sa politique va à l'encontre de l'intérêt collectif et ne vise qu'au bénéfice toujours plus grand d'une élite.

A ce compte, évidemment, toute la clique Fillon-Sarkozy devrait déjà être en prison.


18 février 2009 : REVOLUTIONS

On a beau être sceptique face à la violence et surtout face à l'issue de toute révolution, l'arrogance du pouvoir sarkozyste et des élites économiques qu'il sert est telle qu'on ne pourrait que se réjouir de voir leurs abjections accumulées leur sauter enfin à la gueule.

Voir la France secouer le joug serait magnifique si ce n'était pas ridicule, après qu'elle ait élu Sarkozy à 53%. Mais on m'objectera que ce n'est pas la même France, qu'il y a la France égoïste et rassie qui a voté pour lui, et la France qui lutte. Admettons.

***

Le film réalisé il y a quelques années par Patricio Guzman sur Salvador Allende nous rappelle au passage qu'il existe (qu'il a existé, en tous cas) des leaders de gauche aussi intègres que charismatiques. La personnalité d'Allende, appliquant son programme sans violence et dans le respect le plus absolu de la démocratie, est une grande leçon de politique. On chercherait vainement au PS quelqu'un qui ait le millième de l'envergure et de l'intégrité de cet homme.

Trois années de réformes pacifiques mais radicales, jusqu'au coup d'Etat de 1973 et à l'assassinat d'Allende, orchestrés par la CIA. Puis la dictature de Pinochet, la répression et la torture, et le Chili transformé en laboratoire du néolibéralisme.

Aussi contestable que soit la dictature du prolétariat, force est malheureusement de constater que ceux qui, contrairement aux bolcheviks, ont voulu préserver la démocratie, dans l'Espagne du Frente Popular comme dans le Chili d'Allende, ont été éliminés sans aucune pitié. Désespérant.


24 avril 2009 : CHARYBDE ET SCYLLA

On a parfois l'impression que les Français (pour s'en tenir à eux) sont (re)devenus intelligents, simplement parce qu'ils ne disent pas toujours les mêmes conneries. De cette versatilité seule vient l'illusion transitoire qu'ils ont retrouvé leurs esprits. L'évolution de la popularité de Sarkozy en est un bon exemple. Devant la dégringolade, on a tendance à se dire que les gens ont enfin ouvert les yeux, mais si on y regarde de près, outre que ces cons-là l'ont tout de même massivement élu, il faut constater que :

- Sarkozy a repris récemment 6 points, au beau milieu de la crise générée par son idéal économique et des manigances sordides de ses amis (par exemple, Dexia, renflouée par l'Etat et dont les dirigeants s'octroient aussitôt bonus et augmentations colossales).

- un des personnages les plus appréciés des Français actuellement est ... Jacques Chirac !

On admettra qu'il est difficile de se tourner vers la gauche socialiste (consternante) ou la gauche de gauche (divisée), mais tout de même !

Etrange, cette façon de se tourner vers la droite quand on est déçu par la gauche. L'Histoire de France est pleine de ce genre de revirements absurdes depuis 1789. C'est un peu comme si la droite et la gauche étaient, non des idéologies ou des idéaux, mais simplement des institutions incarnées par un personnel politique donné, et que la seule solution, si l'on est déçu par Pierre, est de se tourner vers Paul (puis, déçus par Paul, de revenir vers Pierre, ou vers son dauphin, ou vers son prédécesseur, ou vers son cousin Villepin, etc.)

La gauche est (devrait être) ce que les hommes et les femmes de gauche en font, ce qu'ils construisent, ce qu'ils proposent comme applications pratiques à leurs idéaux dans un contexte donné, et non une étiquette accaparée par des rentiers de la politique. Si après mûre réflexion j'ai décidé de défendre des idéaux progressistes, dois-je y renoncer simplement parce que ceux qui prétendent représenter politiquement ces idéaux sont des buses ou des salauds ? Dois-je y renoncer simplement parce que ces gens-là trahissent les idéaux de la gauche et les prennent en otage en prétendant être seuls à pouvoir être élus au nom de ces idéaux ? Dois-je pour toutes ces raisons et pour toute réponse à cette trahison me mettre à voter Sarkozy (ou Le Pen si je suis très très con ... ou Bayrou si je suis vaguement moins con qu'un sarkozyste ...) ?

Il me semble que le peuple de gauche devrait plutôt dire au PS : "Vous n'êtes plus la gauche, vous n'avez plus rien de socialiste, cassez vous, libérez les locaux et allez rejoindre Kouchner et Besson aux pieds de Sarkozy, c'est là qu'est votre vraie place. Nous allons reconstruire une véritable gauche, si c'est encore possible."

C'est un peu ce qu'a enfin eu le courage de faire Mélenchon, mais je doute que cela ait beaucoup d'impact sur l'électorat, d'autant plus que Besancenot, plus soucieux d'améliorer son score personnel que de faire progresser concrètement les valeurs de la gauche dans la société, refuse toujours l'alliance.


22 juillet 2009 : ... RETORQUA L'INVITE

Mona Ozouf donne une interprétation assez intéressante du regain républicain de ces dernières années. Une partie de la gauche française a longtemps estimé qu'une évolution vers le socialisme (au sens plus ou moins fort du terme, en tous cas dans un sens n'ayant pas le moindre rapport avec Jack Lang) était l'avenir de la République, considérée comme une simple étape. "A partir de l'effondrement du communisme, il n'y a plus d'avenir socialiste pour la République, et par conséquent la situation s'inverse : c'est la République qui devient l'utopie du socialisme."

Cette bretonne, fille de Yann Sohier, dit des choses fort pertinentes. A Finkielkraut, qui, à l'intégration progressive des minorités et des diverses vagues d'immigration, oppose l'intégration difficile d'une partie de la jeunesse actuelle issue de l'immigration, elle répond simplement que l'un des facteurs majeurs de l'intégration a toujours été le travail et qu'il n'est sans doute pas besoin d'aller chercher des explications plus loin.

***

Le même samedi matin, Jean-Noel Jeanneney justifie l'évolution du PS (militants et surtout dirigeants) vers les classes moyennes et classes moyennes supérieures, en disant qu'après tout cela reflète l'évolution de la société elle-même. Son invité, Alain Bergounioux, souligne que les ouvriers et employés représentent tout de même encore 60% de la population active (si on y ajoute les chômeurs, c'est peu dire que le PS est déconnecté de la réalité sociale).


24 août 2009 : RESSENTIMENT

Le concept de "ressentiment" (ceux qui l'emploient abondamment veulent en général simplement parler de "jalousie", mais je suppose que cela sonne mieux), servant à expliquer l'existence d'une gauche politique, n'est pas totalement absurde pour comprendre les motivations d'une partie des militants et idéologues de gauche. Que certains, dans une proportion que je ne saurais établir, soient mûs par le ressentiment, n'aient en tête que de s'approprier pouvoir et richesses, et non de les redistribuer plus justement, c'est une évidence que la plupart des révolutions confirme et qu'il faut conserver à l'esprit pour éviter des bains de sang inutiles (ou, au moins, pour éviter qu'un bain de sang ait été inutile).

Mais ce type d'analyse présente deux inconvénients. D'abord, il fait mine d'ignorer qu'il existe également une proportion de militants et idéologues sincères, qui ne défendent pas des idées de gauche uniquement pour avoir à leur tour de nombreuses villas avec piscine et toilettes en or massif. Et surtout, cela ne diminue en rien les injustices actuelles, et ce terme de ressentiment, que certains ont en permanence à la bouche, ne sert bien souvent qu'à cautionner le système en place en déplaçant le problème sur les motivations de ceux qui le critiquent.

Nietzsche est bien intéressant dans certaines de ses analyses, mais il y a visiblement une dimension qu'il ignore ou veut ignorer totalement, c'est l'éducation, d'où cette vision du monde opposant une élite raffinée et une masse jalouse. C'est ignorer que le moindre de ces prolétaires, si vous lui donnez dès la naissance les mêmes conditions de vie et d'éducation que celles de l'élite, sera aussi cultivé et raffiné que n'importe quel héritier.


29 novembre 2009 : TRAVAILLER PLUS POUR GAGNER AUTANT

C'est ce que demande la direction d'une entreprise de Sarreguemines à ses salariés (sinon ....).

"C'est inadmissible. On est en pleine régression. Aucun syndicat n'est prêt à accepter une chose pareille", déclare, aux actualités régionales, un syndicaliste portant une casquette CFDT.


14 janvier 2010 : LA BETISE DES SOCIOLOGUES

La bêtise effarante de certains (de nombreux ?) sociologues vient hélas du fait qu'ils sont engagés. Le problème, c'est qu'ils sont de gauche avec la plus entière bonne conscience, persuadés d'être dans le bon camp (ce qui, sans être faux, n'est sans doute pas aussi simple), ce qui les conduit à choisir les faits qui leur conviennent, à nier des évidences dérangeantes, à trouver des excuses à des actes auxquels on peut tout au plus trouver des explications, etc.

L'engagement d'un sociologue n'est pas un problème en soi, à condition de se demander non pas pour qui on s'engage (pour quel camp ? celui des Gentils bien entendu, qui sont tous si merveilleusement altruistes et intelligents), mais pour quoi, c'est-à-dire pour la défense de quelles valeurs (Justice, Progrès, etc.). En s'engageant pour des valeurs, on se donne davantage les moyens de rester honnête et cohérent, car une valeur reste ce qu'elle est (même si ce qu'elle est n'est qu'un idéal jamais totalement atteint), tandis qu'un individu ou un groupe d'individus peut très bien ne rester fidèle ni à lui-même, ni aux valeurs qu'il prétend défendre ou incarner.


24 juin 2010 : LES GAUCHISTES, C'EST COMME LES COCHONS

Voilà, c'est fait : Philippe Val a viré de France Inter à la fois Didier Porte et Stéphane Guillon. Cela se passe de commentaire : ce n'est jamais que la dernière étape d'une déchéance morale assez inouïe.

Par ailleurs, Riposte Laïque, mouvement de la gauche républicaine actuellement mené par Pierre Cassen, ancien de la LCR, afin de dénoncer (à juste titre) l'occupation de certaines rues de la Goutte d'Or par des prières islamistes, a pris l'initiative grotesque et bêtement provocatrice d'organiser à la Goutte d'Or un "apéro géant saucisson-pinard". Ce ne serait qu'une faute de goût si Riposte Laïque n'avait estimé judicieux de s'associer pour l'occasion à des organisations d'extrême-droite. Au fait, le saucisson étant issu du cochon, est-il comme le "pinard", à savoir que plus ça devient vieux, plus ça devient bon ?

Finissons avec Michel Rocard, autre "homme de gauche" plus ou moins officiellement rallié, comme Val, à la défense des intérêts du sarkozysme. Estimant "courageuse" la réforme des retraites menées par Eric Woerth (le monsieur dont l'épouse conseille, semble-t-il, la mère L'Oréal en matière d'évasion fiscale), Rocard critique l'attitude du PS. Sarkozy s'était déjà permis il y a quelques semaines d'attribuer la responsabilité du problème des retraites à Mitterrand qui avait baissé l'âge de départ sans prévoir les conséquences de son acte irresponsable. Rocard en remet une couche en déclarant que le passage en 1981 à la retraite à 60 ans fut décidé "pour faire plaisir au Parti Communiste". Restons sur cet argument. Admettons que Mitterrand n'ait fait cela que pour "faire plaisir" au PC. La question est : pourquoi cela faisait-il tellement plaisir aux communistes ? Parce qu'ils avaient fait un pari lors d'une beuverie ? ou parce que les communistes étaient alors des farfelus capricieux ? Peut-être tout simplement parce que, sincèrement et/ou pour des raisons électoralistes, les communistes (et peut-être aussi Mitterrand) estimaient juste de baisser l'âge de la retraite pour les gens qui bossent pendant que Mme Bettencourt fait fructifier (cf. Fructis, de L'Oréal) son immense fortune et fraude gaillardement le fisc, avec ou sans l'aide du couple Woerth (Eric Woerth n'a rien à voir dans cette affaire, nous assure l'actuel ministre du budget François Baroin, lequel n'a rien à voir avec son épouse l'actrice Michèle Laroque, domiciliée à Las Vegas pour ne pas payer d'impôts). Vous êtes-vous demandé ce qu'il y avait derrière cette explication aussi réductrice que mesquinement malhonnête ("pour faire plaisir au Parti Communiste"), M. Rocard ? Bien sûr que oui, mais votre souci présent n'est plus de penser, c'est d'empêcher les gens de le faire.

Ignoble larbin.

***

Il faudrait au passage s'interroger sur le fait qu'on n'a jamais vu autant de gens "de gauche" passer au service d'un gouvernement de droite, alors que celui-ci est certainement le plus réac et le plus corrompu qu'on ait vu depuis longtemps. C'est peut-être (surtout chez les électeurs) parce que la gauche, surtout au pouvoir, n'avait pas été aussi nulle et aussi veule depuis longtemps. Mais la vraie réponse, en tous cas en ce qui concerne les traîtres d'envergure, est sans doute déjà incluse dans la question, dans le mot "corrompu", qui va aisément de pair avec corrupteur. Il n'y a pas à s'étonner de voir les "ralliements" nauséabonds ou les trahisons plus discrètes se multiplier lorsque le pouvoir en place a un caractère maffieux de plus en plus évident.


6 février 2011 : DES NOUVELLES DU FRONT DE (LA) GAUCHE ou D'UN NECESSAIRE REPOSITIONNEMENT

En tant que parti écologiste bidon, purement médiatique, voué au mieux à la satisfaction du narcissisme et/ou du carriérisme de certains, au pire à la préservation du libéralisme en place par le détournement des voix de gauche, Europe Ecologie est actuellement en train d'hésiter, pour la candidature aux présidentielles, entre Eva Joly et le plus médiatique (et notoirement chiraquien) Nicolas Hulot. L'irruption de ce clanpin dans l'affaire est assez révélateur du degré de sérieux politique de l'entreprise.

Evidemment, rejeter radicalement l'option Europe Ecologie n'empêche pas d'admirer l'action judiciaire d'Eva Joly, on peut apprécier les envolées écologiques visiblement sincères (mais en totale contradiction avec ses autres engagements) de Nicolas Hulot, on peut même goûter à l'occasion les sorties agressives du méprisable mais amusant Cohn-Bendit (récemment contre MAM : "celle-là, il faut qu'elle fasse n'importe quoi, mais sûrement pas Ministre des Affaires étrangères !" : on pourrait évidemment en dire autant d'un bouffon tel que lui, mais ne boudons pas notre plaisir !). De même, le soutien apporté à cette escroquerie par des artistes que j'apprécie (Fred Vargas, Alan Stivell, les Malpolis,...) ne les déconsidère par pour autant à mes yeux : l'idéal annoncé est respectable et on ne peut leur en vouloir de ne pas (vouloir) apercevoir les aspects les plus douteux de l'entreprise.

***

Beaucoup plus problématique est à mes yeux le programme éducation du Parti de Gauche, en tous cas ses grandes orientations, que j'attendais de découvrir (visiblement, cet aspect n'a été abordé que tardivement, ce qui étonne un peu venant d'une gauche qui se dit républicaine). Il s'avère hélas ! d'une inspiration démagogico-pédagogique à faire pâlir d'envie le Docteur Meirieu et tous ses disciples en pédago-nigologie. A croire, comme l'ont affirmé certains "déçus" du PG, qu'il ne s'agit que d'une construction artificielle au service des ambitions de Mélenchon. Voilà qui modifierait considérablement la donne à mes yeux. Si le programme éducation du PG n'est pas moins aberrant (et c'est pour l'instant le cas) que ceux du PS et d'Europe Ecologie, ne vaut-il pas mieux voter en 2012 pour le candidat de gauche le plus à même d'arriver au second tour et de battre la droite (à savoir, même si cela fait peine, le candidat socialiste) ?

Seule la droite semble à présent tenir un discours républicain sur l'école, mais il serait naïf (ou finkielkrautesque, ou polonyen) de croire qu'elle songe un seul instant à l'appliquer sérieusement, d'autant plus naïf que la droite est au pouvoir depuis des années et que les choses ne vont absolument pas dans ce sens). Bref, il faut se résigner : plus aucune formation politique ne porte sérieusement de projet républicain pour l'école. Au mieux peut-on espérer que, les moins pires en la matière étant au pouvoir (mais je renonce pour l'instant à discerner qui seraient ces "moins pires"), il sera loisible, sur le terrain, aux professeurs qui en ont encore la force, de limiter les dégâts. Oublions donc provisoirement l'école (même si elle demeure la clé de l'avenir) et concentrons nous sur les autres domaines pour choisir en 2012. Sur la plupart, le Front de Gauche demeure a priori le plus intéressant dans son discours, mais je me méfie à présent des apparences et de la sincérité de ce discours, du moins en ce qui concerne la composante PG. Je tenterais volontiers le coup malgré tout, histoire de sortir du cercle UMPS et de voir tout de même ce que cela donne une fois au pouvoir, mais il y a si peu de chances pour que le Front de Gauche l'emporte dans l'état actuel des choses que j'en arrive à présent, la mort dans l'âme, à me dire qu'il vaudrait sans doute mieux, puisqu'il n'y a décidément et présentement aucune alternative crédible, limiter les risques d'un morcellement des voix de gauche et se résigner à voter PS dès le premier tour pour avoir au moins la satisfaction de voir enfin calter la clique à Sarko. Ou même de miser malgré tout sur Europe Ecologie, malgré ses positions éducatives (pas pires que celles du PG) et économiques (pas pires que celles du PS), ne serait-ce que pour voir la corruption combattue un peu plus efficacement (on peut rêver) par Eva Joly que par le PS.

Bon, j'examine là les diverses possibilités, mais il faut bien avouer qu'aucune n'est véritablement enthousiasmante. La suite des événements nous aidera peut-être à y voir un peu plus clair, mais il semble de toute façon quasi-certain que le PS soit le seul en mesure de l'emporter, alors, pour l'instant, résignons-nous ! En espérant qu'un jour, mais un jour qui s'annonce de plus en plus lointain, on pourra espérer quelque évolution un peu plus exaltante. En attendant, la seule chose à faire est de limiter les dégâts, et de maintenir autant qu'il est possible un autre discours, de plus en plus minoritaire, sans se laisser avaler par la force du discours dominant. Limiter les dégâts en attendant de meilleures perspectives, de plus en plus hypothétiques, hélas !

 


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