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MARIAGES MIXTES
Le livre de Schlomo Sand (Comment le peuple juif fut inventé) pourrait passer pour antisémite s'il était écrit par un auvergnat, mais ce n'est pas le cas. Il montre notamment toute la part d'indéniable racisme (jusqu'à reprendre les pires clichés de l'antisémitisme "chrétien") qui nourrit l'idéologie sioniste, laquelle fut d'une certaine manière obligée d'en passer par là, faute d'un moyen efficace de définir un "peuple juif" autrement que d'un point de vue purement religieux. Je passe ici sur toutes les formes de ce délire raciste, en particulier sur la recherche désespérée d'un "gène juif" par de grands généticiens israéliens qui n'ont visiblement rien de mieux à foutre. Je me contenterai d'évoquer cette haine du mariage mixte, c'est-à-dire avec un non-juif ou une non-juive, qui a existé jadis au temps d'Esdras et Néhémie et qui a fait sa réapparition en Israël il y a quelques décennies, au grand dam des nombreux juifs sans préjugés qui étaient venus s'installer là avec leur conjoint non-juif en pensant arriver dans un pays tolérant.
Golda Meir déclara en 1972 qu'un juif épousant une non-juive rejoignait à ses yeux les six millions de victimes du nazisme.
Cela rappelle aussi cette phrase fameuse d'Anne Sinclair déclarant jadis que jamais elle n'aurait pu épouser un non-juif. Pierre Desproges avait à l'époque commenté la bêtise d'une telle conception, précisant qu'elle le choquait d'autant plus qu'Anne Sinclair était et restait pour lui une amie. En 1967, Stanley Kramer mettait en scène dans Devine qui vient dîner ? le majestueux couple Katharine Hepburn et Spencer Tracy, qui, comme je l'ai appris récemment, étaient d'ailleurs amis de l'autre couple hollywoodien de légende, les talentueux et anti-maccarthystes Bogart et Bacall, mais ne nous égarons pas ...


Donc, Hepburn et Tracy jouent un couple de vieux intellectuels libéraux (aux USA, ça veut dire qu'ils sont très à gauche, ça n'a rien à voir avec le néolibéralisme) et farouchement antiracistes, qui découvrent que leur grande fille a décidé d'épouser un noir, Sidney Poitier en l'occurence, mais tout de même, Poitier ou pas, intellectuels libéraux ou pas, la nouvelle a tout de même un peu de mal à passer. C'est un beau film, qui pointe bien les réactions racistes qui peuvent surgir en chacun de nous, mais bon, c'est tout de même Katharine Hepburn et Spencer Tracy, et pas des gros cons, alors ça se termine tout de même bien. On se moque pendant le film de leurs réactions "racistes", mais ils finissent par les surmonter. Seulement, qui, à part Desproges, a eu le réflexe de se moquer, de s'indigner, des propos immensément plus ineptes d'Anne Sinclair. D'autant plus que, quitte à épouser un juif, elle aurait pu au moins dégotter un Woody Allen, un Dave Brubeck ou je ne sais qui d'admirable : au lieu de quoi, elle n'a rien trouvé de mieux à épouser que DSK. Après tout, on n'a que ce qu'on mérite. J'ose croire que n'importe quelle femme sensée, libre de tout préjugé racial, préférerait de très loin avoir épousé Sidney Poitier.
